Le juge judiciaire et le climat : une décennie de construction silencieuse depuis l’Accord de Paris

Christophe Soulard
Premier président de la Cour de cassationIssue
Issue #6Auteurs
Christophe Soulard
                Une revue scientifique publiée par le Groupe d'études géopolitiques
Climat : la décennie critique
La crise climatique mondiale, par son caractère multi-causal, sa portée internationale et ses implications intergénérationnelles, exige une réponse institutionnelle d’une ampleur sans précédent 1 . Cette complexité impose aux États une adaptation constante de leurs cadres juridiques. Face à des défis systémiques irréductibles à des solutions simples, les doctrines juridiques traditionnelles se montrent souvent limitées. Comme le soulignait Mireille Delmas-Marty, il est nécessaire d’imaginer de nouvelles voies pour passer d’un pluralisme chaotique à un pluralisme ordonné 2 , apte à relever les défis de notre survie collective.
Si le droit de l’environnement est par essence l’affaire de tous, sa haute technicité et sa complexité semblent nécessiter un temps pour l’appropriation par les professionnels du droit. Il en résulte un contentieux que des rapports associatifs qualifient de « délaissé » et d’« invisible », représentant moins de 0,5 % de l’ensemble du contentieux civil et entre 0,5 % et 1 % des affaires traitées par les parquets 3 . Malgré ces statistiques modestes, l’ordre judiciaire joue un rôle significatif en matière de protection de l’environnement et des autres droits qui sont mis en balance dans des affaires de pollution ou de destruction de milieux naturels. Sans jamais se substituer aux pouvoirs législatif et exécutif, il veille au respect de l’État de droit, de la Constitution et des principes environnementaux qu’elle consacre : sa contribution est certes moins médiatisée que celle des juridictions administratives ou européennes, mais l’apport de l’ordre judiciaire, notamment de la Cour de cassation, n’en est pas moins essentiel. Son rôle s’exerce moins par des décisions à grand retentissement que par une évolution subtile et une modernisation des concepts juridiques établis.
L’Accord de Paris de 2015 a agi comme un catalyseur, incitant les juges à intégrer plus profondément les considérations environnementales et à adopter une approche prospective et systémique. Ainsi, un nombre important de décisions mais aussi de pratiques de l’ordre judiciaire s’inscrivent dans une démarche d’anticipation et d’adaptation aux mutations juridiques nécessaires, contribuant à l’édification d’un droit du climat qui balance intérêts économiques, libertés individuelles et protection de l’environnement. Ce mouvement est soutenu par un dialogue avec les autres cours suprêmes ainsi que les juridictions européennes.
Cet article s’intéressera à ce mouvement collectif et son évolution depuis l’Accord de Paris ; il propose d’analyser comment l’ordre judiciaire français a historiquement appréhendé les enjeux environnementaux et climatiques (1), puis examinera les évolutions procédurales au service d’une justice climatique (2), avant d’aborder la dimension institutionnelle de cette mobilisation (3).
I – L’appréhension des enjeux environnementaux et climatiques par le juge judiciaire
Le juge judiciaire s’est saisi des problématiques environnementales et climatiques en adaptant les outils existants et en intégrant de nouveaux instruments juridiques. Cette démarche témoigne d’un rôle moteur, parfois précurseur par rapport au législateur, et l’amène à opérer de délicates mises en balance d’intérêts – y compris parfois entre des facettes différentes de l’impératif écologique lui-même – non sans soulever des difficultés juridiques notables, notamment en matière de causalité.
1 – L’approche traditionnelle du juge judiciaire : l’évolution des concepts juridiques existants à l’aune des enjeux environnementaux
Le juge judiciaire a su faire évoluer des concepts éprouvés pour répondre aux défis environnementaux, en distinguant les approches civiles et pénales. Il est arrivé à l’environnement et au climat par le truchement de mécanismes juridiques préexistants, qu’il a façonnés en véritables instruments de justice environnementale.
Premièrement, avec une ingéniosité éco-juridique, le juge civil a progressivement adapté les instruments classiques du droit civil aux enjeux environnementaux, offrant une seconde vie verdoyante aux concepts traditionnels face aux questions climatiques. Cette adaptation se manifeste notamment par deux biais principaux : d’une part, la sanction des communications commerciales trompeuses sur l’écologie, et, d’autre part, la réparation des nuisances matérielles.Concernant le premier axe, la lutte contre les pratiques d’écoblanchiment (« greenwashing« ) illustre cette démarche. Si la répression de ces pratiques relève fréquemment du droit pénal de la consommation 4 , elles peuvent également engager la responsabilité civile de leurs auteurs sur le fondement du droit commun de la responsabilité délictuelle de l’article 1240 du code civil, à condition de remplir ses critères, qui sont certes classiques, mais dont il peut être particulièrement difficile d’apporter la preuve en matière environnementale. La jurisprudence pénale, en qualifiant de pratique commerciale trompeuse des allégations environnementales infondées, à propos des emballages du « Roundup » de Monsanto, définit un standard de comportement dont le non-respect caractérise la faute civile 5 . Cette approche, consolidée depuis par le législateur, permet ainsi de sanctionner le préjudice subi par les consommateurs ou les concurrents victimes de ces allégations déloyales.
Parallèlement, et sur le terrain des atteintes matérielles à l’environnement, le juge civil s’est emparé de la théorie des troubles anormaux de voisinage. A l’origine création prétorienne 6 implicitement rattachée aux limites du droit de propriété (article 544 du code civil), elle constitue un instrument majeur car elle instaure un régime de responsabilité sans faute 7 , particulièrement adapté aux pollutions diffuses ou aux nuisances industrielles. Le juge du fond apprécie souverainement le caractère anormal du trouble 8 , en procédant à une mise en balance concrète des intérêts en présence, qui peut inclure la prise en compte de l’utilité sociale de l’activité litigieuse, notamment dans le contexte de la transition énergétique ; par exemple, l’arrêt de la troisième chambre civile de 2018 sur les nuisances d’un parc éolien. 9
En effet, ce mécanisme de mise en balance trouve une application directe dans la régulation des conflits environnementaux locaux. Le contentieux des troubles anormaux de voisinage devient ainsi un instrument pour le juge afin de sanctionner des formes de pollutions (olfactives, sonores) quand elles excèdent un certain seuil, comme l’illustre la condamnation d’un éleveur de l’Oise fin 2023 pour les nuisances générées par l’intensification de son activité 10 . Ce type de litige s’inscrit dans des tensions plus vastes autour de modèles agricoles dont l’impact environnemental et climatique est débattu. La controverse autour de la « Ferme des mille vaches », qui associait un élevage bovin industriel à une unité de méthanisation, a ainsi cristallisé l’opposition d’associations de protection de l’environnement face à un projet perçu comme écologiquement insoutenable. En arbitrant ces conflits, les juges ne se contentent pas de régler des querelles de voisinage ; ils participent de fait à la définition des limites environnementales locales d’activités économiques pouvant avoir des implications climatiques.
Mais il semble pertinent dans notre analyse historique de rappeler que l’avancée la plus significative en jurisprudence civile française relevant de l’environnement est la reconnaissance du préjudice écologique. Si l’arrêt fondateur de l’Erika a certes été rendu par la chambre criminelle de la Cour de cassation le 25 septembre 2012 11 , c’est bien sur le fondement des demandes civiles formées par les parties civiles que le principe de la réparation d’une atteinte directe à l’environnement a été consacré. Cette décision a marqué une rupture en admettant la réparation d’un préjudice objectif, détaché des préjudices individuels ou collectifs traditionnels. La Cour s’est ainsi pleinement inscrite dans une vision non-anthropocentrique du droit de l’environnement, rejetant que l’on doive uniquement considérer et mesurer le droit de l’environnement à travers les atteintes portées à ceux de l’homme.
L’histoire a fait de cette décision un pilier et un moment pivot du droit de l’environnement français, cette innovation jurisprudentielle ayant été rapidement suivie par le législateur avec la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, qui a introduit aux articles 1246 à 1252 du code civil un régime spécifique de réparation du préjudice écologique. L’article 1247 du code civil le définit comme « une atteinte non négligeable aux éléments ou aux fonctions des écosystèmes ou aux avantages collectifs tirés par l’homme de l’environnement ». Dans sa décision portant sur la constitutionnalité de ce seuil de « non-négligeabilité » le Conseil constitutionnel a également souligné la distinction entre le « préjudice écologique pur » (l’atteinte à la nature per se) et le « préjudice collectif » (l’atteinte aux avantages humains tirés de l’environnement), confirmant la trajectoire initiée par la Cour de cassation dans l’arrêt de l’Erika 12
Depuis la création du régime civil de réparation de ce préjudice (priorité donnée à la réparation en nature et à la remise en état 13 ), un corps de jurisprudence civile le mettant en application s’est progressivement développé, illustrant le dialogue entre le judiciaire et le législatif qui aboutit à l’élaboration d’un corpus cohérent de nouvelles règles et pratiques protectrices de l’environnement.
En contraste avec le dynamisme observé sur le versant civil, l’appréhension des enjeux écologiques par le droit pénal s’est historiquement avérée plus graduelle et moins « révolutionnaire ». Cette évolution progressive s’explique notamment par la double contrainte du principe de la légalité des délits et des peines, qui exige des incriminations législatives précises souvent tardives ou initialement lacunaires en matière écologique, et par une politique de poursuites longtemps restée en deçà des enjeux. Cette insuffisance est due à plusieurs facteurs mis en lumière par la doctrine mais aussi les associations et l’institution elle-même. En effet, le rapport Molins soulignait en 2022 à la fois l’inadaptation du droit pénal commun à la problématique spécifique du contentieux environnemental et à quel point le contentieux de l’environnement représentait « qu’une très faible part de l’activité des juridictions pénales », ce qui a mécaniquement limité les opportunités pour le juge répressif de construire une jurisprudence aussi fournie que son pendant civil.
Historiquement, le juge pénal s’est donc appuyé sur un corpus d’infractions dispersées, principalement contenues dans des lois spéciales puis dans le code de l’environnement, visant des atteintes spécifiques comme les délits de pollution de l’eau ou de gestion non conforme des déchets. Face à l’insuffisance de ces textes pour appréhender la dangerosité de certains comportements, le parquet et les juges ont parfois mobilisé par ricochet des incriminations de droit commun, au premier rang desquelles figure le délit de mise en danger délibérée de la personne d’autrui (article 223-1 du code pénal), bien que la Cour de cassation ait jugé que la protection de l’environnement per se ne pouvait suffire à le caractériser 14 .
La persistance de cette vision anthropocentrique de la loi pénale était une faiblesse soulignée par la doctrine, qui a longtemps appelé à la création d’une infraction de mise en danger de l’environnement, infraction qui a tardé à voir le jour 15 .
Dans ce contexte d’une action publique souvent timide, le rôle des associations de protection de l’environnement fut déterminant, agissant comme un véritable aiguillon de l’action répressive. Se fondant sur les dispositions du code de procédure pénale et sur les habilitations spécifiques prévues notamment par l’article L. 142-2 du code de l’environnement, ces dernières ont pu, par le biais de la plainte avec constitution de partie civile, déclencher l’action publique et porter la voix de l’intérêt collectif devant les prétoires. La chambre criminelle a progressivement consolidé la légitimité de leur intervention, qualifiant leur action civile de « droit exceptionnel » devant être « strictement renfermé dans les limites fixées par le code de procédure pénale », mais leur reconnaissant le droit à la réparation d’un préjudice moral direct et personnel résultant de l’atteinte aux intérêts collectifs qu’elles défendent.
La Cour a ainsi validé à de multiples reprises leur constitution de partie civile, que ce soit pour des faits de pollution 16 ou d’atteintes à la faune sauvage 17 , consacrant leur rôle de sentinelles.
Toutefois, ce corpus classique et ces avancées jurisprudentielles, aussi significatives fussent-elles, ont progressivement révélé leurs limites face à la systématisation et à l’aggravation des atteintes à l’environnement. Il est important de rappeler que c’est l’institution judiciaire elle-même qui a dressé un constat sévère de l’inefficacité du dispositif traditionnel, le rapport Molins relevant la grande technicité du droit pénal de l’environnement, la fragilité du lien de causalité et des sanctions jugées peu dissuasives, dominées par des amendes aux « montants assez faibles » et des peines d’emprisonnement « rares » et généralement assorties du sursis. Le rapport souligne en outre une tendance à la « dépénalisation de fait », où le recours massif aux alternatives aux poursuites (75% de la réponse pénale) et la rareté des jugements correctionnels (5,4% des délits environnementaux) créent une impression d’impunité, alors même que l’opinion publique et sa réprobation sociale ne cessaient d’augmenter. Ce sentiment partagé d’une forme d’échec de la réponse pénale traditionnelle a souligné l’impérieuse nécessité d’une refonte de l’arsenal répressif, constat qui justifie l’émergence des nouveaux outils législatifs qu’il convient désormais d’aborder.
2 – Des outils juridiques innovants : législations récentes face aux défis de ces nouveaux contentieux
Face aux limites des instruments juridiques traditionnels, le législateur est intervenu pour doter le juge de nouveaux outils, particulièrement en matière de responsabilité des entreprises et de renforcement de l’arsenal répressif.
Cette dynamique s’illustre de manière exemplaire à travers le contentieux émergent du devoir de vigilance, issu de la loi n° 2017-399 du 27 mars 2017. Loi pionnière à l’échelle mondiale, ce texte a instauré un mécanisme de responsabilisation inédit pour les sociétés multinationales. Son objectif est de prévenir les atteintes graves aux droits humains, à la santé et à la sécurité des personnes, ainsi qu’à l’environnement, qui pourraient découler non seulement des activités de la société mère, mais aussi de celles de ses filiales, sous-traitants et fournisseurs avec lesquels elle entretient une relation commerciale établie. Pour ce faire, la loi impose aux sociétés dépassant certains seuils d’effectifs (5 000 salariés en France ou 10 000 dans le monde, filiales incluses) l’obligation d’élaborer, de publier et de mettre en œuvre un plan de vigilance. Ce dernier doit comporter des mesures précises et effectives : une cartographie des risques, des procédures d’évaluation régulière de la situation des filiales et partenaires, des actions adaptées d’atténuation des risques, un mécanisme d’alerte, ainsi qu’un dispositif de suivi de l’efficacité des mesures.
L’architecture juridique de ce dispositif, qui déplace la responsabilité sociétale de l’entreprise (RSE) d’une démarche volontaire vers une obligation légale contraignante 18 , a ouvert de nouvelles voies contentieuses. Le régime de sanction, remanié après la censure par le Conseil constitutionnel de l’amende civile initialement prévue, repose sur un double mécanisme judiciaire, dont la compétence a été attribuée au seul tribunal judiciaire de Paris. D’une part, toute personne justifiant d’un intérêt à agir peut, après mise en demeure, saisir le juge pour qu’il enjoigne à la société de respecter ses obligations. D’autre part, et de manière distincte, le manquement à ces obligations engage la responsabilité civile de la société pour la réparation du préjudice qui aurait pu être évité par un plan adéquat et effectivement mis en œuvre.
La mise en œuvre contentieuse de cette loi a connu une évolution notable. Si en 2023 une première décision de première instance avait rejeté une action pour des motifs procéduraux 19 , des arrêts de la Cour d’appel de Paris du 18 juin 2024 ont marqué une inflexion décisive 20 . En déclarant des actions recevables, la Cour d’appel a clarifié des points procéduraux essentiels, précisant notamment que l’assignation n’a pas à viser le même plan de vigilance si les manquements persistent, et que l’action fondée sur la loi sur le devoir de vigilance peut se cumuler avec celle relative au dommage écologique. Cette jurisprudence émergente, en levant les premiers obstacles procéduraux, semble désormais ouvrir la voie à un examen au fond des plans de vigilance. Ce mouvement est par ailleurs soutenu par l’adoption de la directive européenne sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité (CSDDD) 21 , qui inclut une obligation de vigilance climatique, promettant une intensification de ces litiges.
Au-delà du régime spécifique instauré par la loi de 2017, la notion même de devoir de vigilance infuse plus largement la jurisprudence de droit commun. Cette tendance de fond est illustrée par plusieurs arrêts rendus par la Cour de cassation le 15 novembre 2023 dans le cadre du contentieux du Mediator. Dans ces décisions, la Cour juge que le manquement d’un producteur à son « devoir de vigilance et de surveillance », en maintenant en circulation un produit dont il connaît les risques, constitue une faute distincte du défaut de sécurité du produit, engageant sa responsabilité délictuelle de droit commun 22 .
La portée de cette solution, bien que rendue en matière de santé publique, mérite d’être soulignée. En consacrant ainsi l’autonomie d’une faute de droit commun pour manquement à un devoir de vigilance face à un risque connu, la Cour de cassation consolide les contours d’un standard général de comportement prudent pour les entreprises. Sans préjuger de l’évolution de la jurisprudence, cette clarification invite naturellement la doctrine à s’interroger sur le périmètre d’une telle responsabilité des acteurs économiques face à d’autres types de risques avérés, notamment environnementaux et climatiques.
Du renforcement répressif au défi probatoire : la double dynamique du contentieux climatique
Face au constat récurrent de l’inefficacité de la réponse pénale en matière environnementale, le législateur a récemment engagé un renforcement substantiel de l’édifice répressif. La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021, dite « Climat et Résilience », qui traduit une partie des propositions de la Convention Citoyenne pour le Climat 23 , constitue la pierre angulaire de cette nouvelle ambition. Celle-ci se déploie sur plusieurs fronts, témoignant d’une volonté d’appréhender le contentieux environnemental dans sa globalité, de la caractérisation de l’infraction à son traitement judiciaire.
Sur le plan matériel, la loi a refondu la nomenclature des atteintes à l’environnement en créant une nouvelle hiérarchie d’incriminations. À sa base se trouve désormais un délit général de pollution des milieux, inscrit à l’article L. 231-1 du code de l’environnement, qui sanctionne de cinq ans d’emprisonnement et d’un million d’euros d’amende les atteintes graves et durables aux écosystèmes résultant de la violation manifestement délibérée d’une obligation de prudence. En complément, le législateur a introduit un délit de mise en danger de l’environnement à l’article L. 173-3-1 du même code. Conçue comme une infraction-obstacle, cette disposition permet d’incriminer le comportement dangereux en lui-même, en amont de toute pollution avérée, marquant ainsi une volonté d’intervention préventive.
Au sommet de ce nouvel édifice répressif, le texte consacre le très attendu délit d’écocide à l’article L. 231-3 du code de l’environnement. Il ne s’agit pas d’une infraction autonome, mais de la qualification intentionnelle et, par conséquent, aggravée du délit général de pollution et de certaines atteintes liées aux déchets, punie de dix ans d’emprisonnement et de 4,5 millions d’euros d’amende. Si cette innovation était souhaitée de longue date, sa consécration a suscité d’importantes critiques doctrinales. Le choix de la qualification de « délit » plutôt que de « crime », contrairement aux préconisations de la Convention Citoyenne, ainsi que son insertion dans le code de l’environnement et non dans le code pénal, ont été perçus comme une minoration de sa portée symbolique 24 . De surcroît, la complexité de ses éléments constitutifs, notamment le critère de « durabilité » de l’atteinte, fixé de manière précise à « au moins sept ans », soulève des interrogations quant aux difficultés probatoires qui en découleront et donc, in fine, à l’effectivité du texte.
Cette volonté de durcissement des normes pénales environnementales ne se limite pas aux atteintes directes aux écosystèmes ; elle s’étend également à la probité du discours écologique. Dans la continuité de la loi n° 2020-105 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire (dite « loi AGEC »), la loi Climat et Résilience a intensifié la lutte contre l’écoblanchiment. D’une part, elle a modifié l’article L. 121-2 du code de la consommation pour que les allégations relatives à l’« impact environnemental » puissent explicitement fonder une pratique commerciale trompeuse. D’autre part, et surtout, elle a créé une sanction aggravée à l’article L. 132-2 du même code, permettant de porter l’amende jusqu’à 80 % des dépenses publicitaires engagées, un seuil particulièrement dissuasif.
Enfin, la portée de ce renforcement matériel serait limitée sans une adaptation structurelle de l’appareil judiciaire. Conscient de la haute technicité de la matière, le législateur a, par la loi du 24 décembre 2020, institué des Pôles Régionaux de l’Environnement (PRE). Cette spécialisation vise à centraliser et à optimiser le traitement des affaires environnementales les plus complexes. Cette initiative s’inscrit dans un mouvement plus large de densification du paysage juridictionnel spécialisé (aux côtés des JULIS, JIRS, PSPE, ou encore des PAC), avec pour objectif de rendre la réponse pénale plus lisible et efficace, bien que les défis structurels pointés par le rapport Molins sur la justice environnementale demeurent d’actualité.
Le défi probatoire, épreuve de l’effectivité du nouveau cadre répressif
Cependant, cette architecture législative et structurelle, aussi ambitieuse soit-elle, se heurte à un défi majeur qui en conditionne l’effectivité : le défi probatoire. Le contentieux climatique et environnemental, par sa nature même, met en tension les cadres traditionnels de la preuve juridique 25 . En particulier, l’établissement du lien de causalité entre un fait générateur (émission de gaz à effet de serre, rejet polluant, inaction étatique) et un dommage qui, par essence, est global, diffus et multifactoriel, constitue une difficulté structurelle 26 . Cette dernière contraint le juge à des adaptations substantielles de son office et confère un rôle renforcé à l’expert scientifique. Sans une évolution des méthodes probatoires, le durcissement des incriminations risquerait de rester lettre morte.
Le cœur de ce défi réside dans l’inadéquation entre les modèles classiques de la responsabilité, conçus pour des préjudices directs et localisés, et le caractère systémique du changement climatique. Alors que le droit de la responsabilité civile ou pénale s’est historiquement construit sur une chaîne de causalité identifiable, le contentieux climatique se heurte à une dilution de cette dernière : les émissions d’un acteur se mêlent dans l’atmosphère à celles d’innombrables autres, et leurs effets se manifestent à une échelle planétaire avec un important décalage temporel. Cette inadéquation fondamentale oblige le système juridique à innover, au risque de voir le droit à un environnement sain et les obligations climatiques, y compris pénales, devenir purement théoriques faute de justiciabilité effective.
Dans ce contexte, le rôle de l’expertise scientifique est devenu prépondérant. Le juge est désormais largement dépendant des travaux d’organismes faisant autorité, au premier rang desquels figure le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Les rapports du GIEC, par leur nature exhaustive, leur processus de validation par les pairs et la participation des États à leur approbation, constituent un socle factuel difficilement contestable. La science de l’attribution, qui vise à lier des événements météorologiques extrêmes spécifiques au changement climatique anthropique, gagne également en précision, fournissant aux tribunaux des outils de plus en plus robustes. Toutefois, le dialogue entre science et droit demeure complexe : le juge doit traduire les probabilités et les marges d’incertitude inhérentes à la science climatique en une certitude juridique binaire, nécessaire au prononcé d’une décision. La preuve juridique doit s’accomplir malgré la présence des incertitudes.
Face à cette complexité, la jurisprudence a fait preuve d’une remarquable capacité d’adaptation. En droit français, l’assouplissement des exigences probatoires peut se matérialiser par le recours à des présomptions de causalité et la méthode du « faisceau d’indices graves, précis et concordants ». Par ailleurs, le principe de précaution, consacré par le droit de l’Union européenne (article 191 TFUE) et irriguant le droit national, peut légitimer une action judiciaire même en présence d’incertitudes scientifiques, dès lors qu’existent des indications plausibles d’un risque grave 27
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Plusieurs décisions emblématiques illustrent cette évolution. Dans l’affaire Urgenda c. Pays-Bas (2019), la justice néerlandaise a écarté l’argument de la contribution négligeable de l’État pour établir la causalité sur le fondement de son manquement au devoir de vigilance (art. 2 et 8 ConvEDH). Suivant une approche similaire, les juridictions administratives françaises dans l’Affaire du Siècle (2021) et Commune de Grande-Synthe (2021) ont fondé la causalité non sur une pollution spécifique, mais sur l’inaction fautive de l’État à respecter ses propres engagements climatiques. Ces affaires démontrent une mutation où le fait générateur devient le manquement à une obligation juridique préexistante, dont le caractère préjudiciable est soutenu par le consensus scientifique.
En somme, face aux défis inhérents au contentieux climatique, les juridictions adaptent leurs outils probatoires. En mobilisant présomptions, faisceaux d’indices et en redéfinissant les contours du lien de causalité, elles s’efforcent d’assurer l’accès à la justice et la redevabilité des acteurs. Cette évolution pragmatique, qui n’est pas exempte de débats sur le rôle du juge, témoigne de la vitalité d’un droit qui se transforme pour répondre aux enjeux cardinaux de la société contemporaine.
Le juge judiciaire, arbitre des antagonismes environnementaux
Au-delà des défis probatoires, une des complexités majeures du contentieux environnemental et climatique réside dans la délicate mission de mise en balance d’intérêts et de droits de natures et de valeurs hétérogènes. Loin de l’opposition binaire classique entre développement économique et protection de l’environnement, le juge est aujourd’hui confronté à des poly-conflits où s’entremêlent des droits fondamentaux comme le droit à un environnement sain, des libertés publiques telle la liberté d’entreprendre, des droits subjectifs comme le droit de propriété, et des intérêts collectifs diffus comme la préservation de la biodiversité. Cette pesée des intérêts est d’autant plus subtile qu’elle oppose parfois l’impératif écologique à lui-même !
Le contentieux lié à l’implantation des parcs éoliens en est une illustration paradigmatique. D’un côté, la promotion des énergies renouvelables répond à un « objectif d’intérêt public poursuivi par le développement de l’énergie éolienne », essentiel à la transition énergétique et à la lutte contre le changement climatique. De l’autre, ces installations peuvent générer des atteintes à des intérêts tout aussi dignes de protection. Le juge judiciaire, lorsqu’il est compétent, notamment pour statuer sur les troubles anormaux de voisinage ou les irrégularités d’une installation 28 , doit alors opérer un arbitrage concret. Il est ainsi amené à confronter l’objectif de décarbonation avec, par exemple, la protection de la biodiversité et des espèces protégées. La jurisprudence de la Cour de cassation témoigne de cette difficile conciliation d’« objectifs environnementaux antagonistes », comme lorsqu’elle examine le risque de dommages causés par des éoliennes à des espèces protégées telles que le faucon crécerellette 29 ou l’aigle royal 30 . Dans ces affaires, le juge doit évaluer si les mesures d’évitement et de réduction des impacts sont suffisantes pour justifier l’atteinte portée à la faune au nom d’un intérêt supérieur.
De même, le juge doit mettre en balance l’intérêt général du projet éolien avec les droits des riverains, notamment le respect de leur droit de propriété et de leur droit à un cadre de vie paisible, souvent invoqués via la théorie des troubles anormaux du voisinage. L’appréciation souveraine des juges du fond doit alors déterminer si les nuisances visuelles ou sonores dépassent, en dépit de l’utilité publique du projet, les inconvénients normaux que chacun doit supporter. Cet arbitrage délicat illustre parfaitement la nouvelle mission qui incombe au juge : il ne s’agit plus seulement de choisir entre l’environnement et le reste, mais bien de trancher entre des facettes différentes, et parfois concurrentes, de l’impératif écologique lui-même, en assurant une conciliation qui ne soit pas manifestement déséquilibrée.
Toutefois, l’existence de ces outils juridiques demeurerait lettre morte sans des mécanismes procéduraux permettant de les activer, ce qui impose d’analyser l’évolution des règles qui gouvernent l’accès à la justice.
II – Les évolutions procédurales au service d’une justice climatique et environnementale judiciaire
La mise en œuvre effective du droit de l’environnement et du climat repose également sur des mécanismes procéduraux adaptés, permettant un accès à la justice et une anticipation des dommages.
1 – Le droit d’agir en matière environnementale préservé et étendu par le juge
En l’absence de personnalité juridique reconnue à la nature, le législateur français a conféré aux associations un rôle prépondérant : celui de « sentinelles » habilitées à porter l’intérêt collectif environnemental devant les prétoires. Ce droit d’agir, condition de l’effectivité de la justice environnementale, est principalement encadré par les dispositions de l’article L. 142-2 du code de l’environnement 31 . Toutefois, c’est la jurisprudence de la Cour de cassation, tant civile que pénale, qui, par une dialectique entre rigueur procédurale et audace substantielle, a progressivement consolidé la place des associations comme des acteurs incontournables du contentieux.
La double approche de la chambre criminelle : rigueur formelle et audace substantielle
Tel que déjà indiqué, la chambre criminelle qualifie l’action des associations de « droit exceptionnel » devant être « strictement renfermé dans les limites fixées par le code de procédure pénale » 32 . Cette vision se traduit par un contrôle rigoureux des conditions de recevabilité de leur action. À titre d’illustration, elle écarte l’application du régime spécial de l’article L. 142-2 du code de l’environnement lorsqu’une association ne dispose pas d’un agrément valide, exigeant alors la démonstration d’un préjudice personnel et direct. C’est en vertu de ce raisonnement qu’elle a jugé irrecevable l’action d’une association pour mise en danger d’autrui, considérant qu’une personne morale ne peut, par nature, subir un risque d’atteinte à son intégrité physique 33 . Cette exigence de rigueur s’étend aux aspects purement formels, comme l’a montré le rejet d’une constitution de partie civile qui n’avait pas été précédée d’une plainte simple déposée personnellement par l’association 34 .
Cependant, cette sévérité formelle est contrebalancée par une jurisprudence de fond particulièrement novatrice. La chambre criminelle a en effet consacré une conception très large du préjudice moral des associations. Il est désormais acquis que la seule transgression de la réglementation environnementale, même sans atteinte physique avérée aux écosystèmes, suffit à causer un préjudice moral indemnisable aux associations agréées, dès lors que cette violation heurte l’objet collectif qu’elles défendent (Crim. 29 juin 2021, n° 20-82.245). La Cour a par la suite précisé que ce préjudice moral est parfaitement autonome et peut se cumuler avec la réparation du préjudice écologique pur (Crim. 25 janv. 2022, n° 21-84.366), offrant ainsi une double voie d’indemnisation et renforçant considérablement la portée de l’action associative.
La consolidation par la chambre civile : l’autonomisation de l’action associative
Ce mouvement de renforcement trouve un écho puissant au sein de la troisième chambre civile, qui a contribué à autonomiser l’action associative par rapport à la sphère pénale. Dans un arrêt de principe du 30 novembre 2022, relatif à la mortalité de faucons protégés causée par des éoliennes, la Cour a posé deux clarifications majeures. D’une part, elle affirme que la recevabilité de l’action civile d’une association agréée n’est pas subordonnée à la constatation d’une infraction par le juge pénal ; la simple existence de « faits susceptibles de revêtir une qualification pénale » suffit. D’autre part, elle juge que le juge civil, en constatant lui-même la violation de la loi pour caractériser une faute civile, ne porte pas atteinte à la séparation des pouvoirs mais exerce pleinement son office 35 . Cette dynamique s’étend au contentieux de l’urbanisme. Poursuivant son raisonnement, la Cour a admis que la méconnaissance des règles d’urbanisme, même procédurales, peut fonder une action en démolition, à la condition toutefois que l’association requérante démontre un préjudice personnel qui en découle directement.
En définitive, par des interprétations convergentes bien que distinctes dans leur approche, les chambres civile et criminelle de la Cour de cassation solidifient le statut de l’association comme pilier de la défense judiciaire de l’environnement. Elles lui confèrent les moyens d’agir efficacement, faisant d’elle le mandataire de fait d’une nature juridiquement silencieuse.
L’impulsion de Strasbourg : la légitimation supranationale de l’action associative en matières environnementale et climatique
Cette dynamique interne, par laquelle le juge judiciaire français consolide le rôle des associations environnementales, se trouve aujourd’hui considérablement renforcée et légitimée par une impulsion décisive venue de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). L’arrêt de Grande Chambre Verein KlimaSeniorinnen Schweiz et autres c. Suisse, rendu le 9 avril 2024, constitue en effet une décision fondatrice qui redéfinit les contours du contentieux climatique en Europe et, par ricochet, en France.
La Cour de Strasbourg était confrontée à un obstacle majeur : la difficulté pour des requérants individuels de démontrer une atteinte personnelle d’une intensité suffisante pour satisfaire aux critères traditionnels de la qualité de victime du changement climatique. Pour surmonter cet écueil sans pour autant ouvrir la porte à une actio popularis qu’elle prohibe, la Cour a opéré une distinction fondamentale. Elle a reconnu que la nature diffuse et transgénérationnelle du dommage climatique justifiait d’aménager l’accès à son prétoire pour les groupements.
Ainsi, la Cour a forgé un statut spécifique permettant à une association d’agir, dès lors qu’elle remplit trois conditions : être légalement constituée dans l’État défendeur, avoir pour objet statutaire la défense des droits fondamentaux de personnes affectées par le changement climatique, et être considérée comme « véritablement représentative » des intérêts qu’elle défend. Cette construction prétorienne est d’une importance capitale, car elle confère aux associations une forme de statut de « victime par représentation qualifiée ». Ce statut leur permet de pallier l’impossibilité pratique pour les individus de se prévaloir directement des violations de leurs droits. Ancrant fermement son raisonnement dans le droit à un tribunal (article 6 § 1 de la Convention), la Cour a jugé que refuser à une telle association un examen au fond de ses griefs, étayés par la science, porterait une atteinte à la substance même de son droit d’accès au juge.
Pour l’ordre juridique français, les implications de cette décision sont potentiellement majeures. Bien que le droit interne soit déjà doté d’un régime d’action spécifique pour les associations, l’arrêt KlimaSeniorinnen fournit un standard d’interprétation supranational qui pourrait influencer l’office du juge. Il renforce la légitimité des actions qui lient l’enjeu climatique à la violation des droits fondamentaux, y compris celles dirigées contre des acteurs privés. Dès lors, les juges du fond, tout comme la Cour de cassation, seront incités à interpréter les conditions de recevabilité du droit français à la lumière de ces standards européens, afin de garantir l’effet utile de la Convention. Il s’agit d’assurer un accès effectif à la justice face à un enjeu systémique, confirmant ainsi la trajectoire d’ouverture du prétoire que la jurisprudence nationale avait déjà esquissée.
2 – Les nouveaux outils procéduraux au service de la justice environnementale
La mutation procédurale : de la réparation à l’anticipation
Au-delà des ajustements substantiels, le défi climatique impose une mutation procédurale qui oriente l’office du juge vers l’anticipation 36 . Confronté à la temporalité longue du dommage et à l’incertitude scientifique, celui-ci adopte une posture proactive. Cette évolution correspond à ce que Blanche Lormeteau et Marta Torre-Schaub décrivent comme un « modèle anticipateur », s’incarnant dans les contentieux qui visent à neutraliser les projets « climaticides » avant que leurs effets ne soient irréversibles 37 . La procédure devient ainsi l’instrument d’une responsabilité activement assumée à l’égard des générations futures. La fonction du juge n’est plus seulement d’apprécier le dommage ex post, mais de s’étendre à sa prévention, le plaçant « en amont » des décisions aux conséquences potentiellement irréversibles.
Pour équiper le juge dans cette mission, le législateur et la jurisprudence ont façonné une panoplie d’outils spécifiques, permettant une intervention judiciaire plus agile et mieux adaptée aux différentes étapes du litige.
Les leviers de l’anticipation et de la preuve
L’un des principaux instruments de cette démarche préventive est le référé pénal environnemental. Bien qu’ancien, ce mécanisme permet au juge des libertés et de la détention, à la requête du procureur, d’ordonner en urgence toute mesure utile pour faire cesser une pollution, y compris par la suspension d’opérations. Son efficacité a été renforcée par la Cour de cassation, qui a jugé que sa mise en œuvre n’était pas subordonnée à la caractérisation préalable d’une infraction, facilitant ainsi une intervention judiciaire rapide face à un risque avéré 38 .
En complément de l’intervention d’urgence, la justice environnementale requiert des instruments capables de surmonter la difficulté probatoire qui lui est inhérente. À ce titre, l’expertise in futurum, prévue à l’article 145 du code de procédure civile, se révèle un outil stratégique. Permettant d’ordonner une mesure d’instruction « s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige », elle offre aux potentiels demandeurs les moyens de constituer un dossier solide. La Cour de cassation, qui contrôle que le juge s’assure de l’utilité de la mesure pour un litige en germe non manifestement voué à l’échec 39 , a confié l’appréciation du « motif légitime » au pouvoir souverain des juges du fond 40 . En matière environnementale, où la preuve est technique et menacée de dépérissement, cet outil constitue une traduction procédurale du principe de précaution, permettant de préserver des éléments avant que le lien de causalité ne devienne impossible à établir.
Vers une justice négociée et une réparation collective ?
Parallèlement au renforcement des outils préparatoires au procès, le législateur a exploré des voies alternatives visant une résolution plus pragmatique des atteintes. La convention judiciaire d’intérêt public environnementale (CJIPE), introduite en 2020 à l’article 41-1-3 du code de procédure pénale, s’inscrit dans cette logique. Alternative aux poursuites pour les personnes morales, elle permet au procureur de proposer un accord par lequel une entreprise, sans reconnaître sa culpabilité, s’engage à verser une amende, à mettre en œuvre un programme de conformité et, surtout, à réparer le préjudice écologique. Cet accord, validé par un juge, articule ainsi sanction, prévention et réparation, assurant des mesures correctrices concrètes qu’une simple condamnation pécuniaire ne garantirait pas.
Enfin, ce panorama est complété par le potentiel de l’action de groupe pour répondre à la question des préjudices de masse. Alors que la CJIPE vise le préjudice écologique, l’action de groupe, introduite en 2016, offre une voie à la réparation collective des préjudices individuels découlant d’un même manquement. Bien que son utilisation en matière environnementale demeure limitée, son potentiel pour traiter les préjudices diffus et améliorer l’accès à la justice est désormais clairement identifié. Son déploiement effectif constituerait une étape décisive dans l’adaptation du traitement judiciaire aux enjeux environnementaux.
III – Un ordre judiciaire en mouvement : adaptations institutionnelles et dialogue juridictionnel
Confronté au caractère spécifique et à la technicité croissante des contentieux environnementaux et climatiques, l’ordre judiciaire français, et au premier chef la Cour de cassation, a engagé de profonds changements. Ils se manifestent d’une part par son inscription résolue dans un dialogue juridictionnel et institutionnel étendu, essentiel à la construction d’une réponse juridique cohérente et partagée et d’autre part par des adaptations structurelles et intellectuelles internes visant à renforcer sa capacité à traiter ces litiges complexes.
1 – Le dialogue juridictionnel, source d’une construction normative partagée
L’action de la Cour de cassation en matière environnementale ne saurait s’appréhender isolément ; elle s’inscrit au cœur d’un réseau dense d’échanges nationaux et transnationaux qui nourrit et oriente sa jurisprudence. Cette dynamique de dialogue est particulièrement structurante dans ses rapports avec les cours européennes, où elle a évolué d’une simple réception de jurisprudence vers une véritable collaboration, organisée par des mécanismes procéduraux conçus pour la coopération. Le renvoi préjudiciel devant la Cour de justice de l’Union européenne demeure, à ce titre, un outil essentiel pour garantir l’interprétation uniforme et l’effectivité du droit de l’Union. S’y ajoute la procédure d’avis consultatif prévue par le Protocole n°16 à la Convention européenne des droits de l’homme, qui permet à la Cour de cassation d’interroger en amont la Cour de Strasbourg sur des questions de principe. La France a d’ailleurs été le premier pays à utiliser de ce mécanisme 41 .Ces instruments sont particulièrement précieux pour aborder de concert des problématiques nouvelles et complexes, et cela pourrait donc être le cas dans le domaine des droits climatiques.
Au-delà des cadres institutionnels européens, la Cour de cassation participe activement à un dialogue comparé direct avec ses homologues étrangères. Ce dialogue, qui peut être formel ou informel, se déploie dans des cadres bilatéraux ou multilatéraux, tels que le Réseau des Présidents des Cours suprêmes judiciaires de l’Union européenne ou le Comité franco-britanno-irlandais de coopération judiciaire. Ces enceintes ne se limitent pas à des questions institutionnelles ; elles permettent d’aborder des questions juridiques de fond, comme en témoignent les échanges sur la justice climatique lors de la réunion du comité précité à Édimbourg en juin 2024. Des discussions approfondies sur des affaires emblématiques comme Heathrow Airport (Cour suprême britannique) ou Grande-Synthe (Conseil d’État français), ainsi que sur l’arrêt KlimaSeniorinnen de la CEDH, y ont mis en lumière les défis partagés par les hautes juridictions, notamment en matière de temporalité de l’action du juge et d’effectivité de ses décisions.
Cette coopération externe se double désormais d’une forme de dialogue plus novatrice, qui s’exprime au cœur même des décisions de la Cour. La révolution stylistique récente de la rédaction de ses arrêts, et notamment l’avènement de la « motivation enrichie » pour les affaires les plus importantes, ouvre la voie à une nouvelle pratique 42 . Cette technique rédactionnelle permet en effet d’intégrer dans le raisonnement du juge, non comme source de droit mais à titre de référence ou d’éclairage comparatiste, des solutions dégagées par des juridictions étrangères. Dans un domaine aussi nouveau et intrinsèquement transnational que le contentieux climatique, il est aisé d’anticiper que la Cour de cassation puisse mobiliser cette faculté pour nourrir sa propre réflexion climatique en s’inspirant des jurisprudences d’autres États.
Ces échanges pragmatiques, qu’ils soient externes ou internes à la motivation, nourrissent la réflexion de la Cour et témoignent d’une européanisation croissante du contentieux climatique. Cette tendance est si prégnante qu’elle a d’ailleurs conduit certains à plaider pour un élargissement des compétences d’instances comme le Parquet européen ou Eurojust, voire pour la création d’une juridiction internationale spécialisée 43
Au niveau national, la cohérence de l’édifice juridique repose sur une coopération interne indispensable avec le Conseil d’État et le Conseil constitutionnel. L’affermissement du socle constitutionnel de la protection de l’environnement doit beaucoup au mécanisme de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC), qui a permis la reconnaissance de la portée normative de la Charte de l’environnement de 2004. L’affaire dite « Michel Z. » illustre de manière saisissante ce rôle conjoint des juridictions suprêmes. Saisie d’un litige relatif à l’exonération de responsabilité pour troubles de voisinage en vertu de la théorie de la « pré-occupation », la Cour de cassation a exercé sa fonction de filtre. Jugeant la question nouvelle et dotée d’un caractère sérieux au regard des articles 1er à 4 de la Charte, elle l’a transmise au Conseil constitutionnel. Par sa décision subséquente 44 le Conseil a opéré une avancée majeure. En acceptant d’exercer son contrôle au regard des droits et obligations découlant de la Charte, il a consacré pour la première fois le caractère directement invocable du droit de chacun de vivre dans un environnement équilibré et du devoir de toute personne de prendre part à sa préservation. Cette décision a ainsi transformé ces principes en normes de référence justiciables, faisant de la Charte un instrument juridique vivant au service du justiciable.
Cette construction dialogique se poursuit et s’enrichit. La reconnaissance récente par le Conseil constitutionnel de la valeur constitutionnelle des « biens communs » et des « intérêts des générations futures 45 » est de nature à irriguer la jurisprudence de l’ordre judiciaire, qui sera appelé à intégrer cette dimension prospective dans son contrôle. La convergence institutionnelle est également visible dans la participation de magistrats de la Cour, à des instances de réflexion internationales aux côtés de membres du Conseil constitutionnel. Enfin, ce dialogue s’étend à la doctrine académique, dont les apports, intégrés via les cycles de conférences et la veille du Service de documentation, des études et du rapport SDER, sont essentiels pour permettre à la Cour de fonder ses décisions sur une analyse interdisciplinaire robuste, à la hauteur de la complexité des enjeux climatiques.
2 – Les adaptations internes de l’ordre juridique face à la complexification des litiges
Pour mieux appréhender les enjeux systémiques des nouveaux contentieux, la Cour de cassation a d’abord renforcé ses capacités internes d’analyse et de prospective. Des structures comme le SDER et son Observatoire des litiges judiciaires (OLJ) sont devenues des instruments essentiels de cette transformation. L’OLJ, la structure de la Cour visant à faire lien avec les juridictions du fond pour identifier les contentieux émergents, s’est affirmé comme une cellule de veille active sur des sujets tels que le devoir de vigilance et la responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Cette démarche proactive s’est concrétisée le 7 mai 2025 par la création d’un collège thématique dédié à la RSE. Celui-ci vise à anticiper les vagues contentieuses à venir, notamment celles liées à la CSDDD, et à nourrir le débat sur ce sujet d’intérêt public majeur en réunissant l’ensemble des partenaires de l’Observatoire.
Au-delà de cette fonction de prospective, indispensable pour améliorer la qualité et la réactivité de la justice, le SDER exerce aussi au quotidien une forme d’accompagnement du travail juridictionnel des magistrats, notamment confrontés dans leurs dossiers à des nouvelles questions. En diffusant des études thématiques, il oriente, sans contraindre, la réflexion des juges et favorise ainsi une harmonisation précoce des approches juridiques.
Cette adaptation structurelle s’accompagne d’une ouverture essentielle pour forger une culture juridique commune. Depuis 2022, la Cour de cassation organise des cycles de conférences annuels consacrés aux mutations environnementales, placés sous la direction d’universitaires spécialisés. La progression thématique de ces colloques — des fondements de la responsabilité civile (2022), aux engagements environnementaux et au « greenwashing » (2023), puis à l’office du juge face au temps long (2024) — révèle une démarche institutionnelle structurée et engagée. En parallèle, l’École Nationale de la Magistrature (ENM) a significativement renforcé ses programmes, notamment via le Cycle Approfondi en Justice Environnementale (CAJE), qui fait intervenir des personnalités de premier plan comme la climatologue Valérie Masson-Delmotte, mais aussi des universitaires et avocats engagés dans des projets de recherches ou des contentieux autour de litiges climatiques. Ces efforts conjugués visent à élever le niveau d’expertise à tous les échelons de l’ordre judiciaire, afin de permettre à terme à la Cour de cassation de rendre une jurisprudence climatique de haute qualité, produite par des magistrats qui maîtrisent ces nouvelles problématiques.
Au-delà de ces adaptations institutionnelles et de ce dialogue normatif, l’évolution de la jurisprudence environnementale est également portée par un facteur générationnel non négligeable. En effet, la nouvelle génération de magistrats qui rejoint progressivement les juridictions aborde ces enjeux avec une sensibilité et une familiarité intrinsèquement différentes de celles de ses aînés. Formés à l’université puis à l’École Nationale de la Magistrature à une époque où le code de l’environnement était pleinement établi, où la Charte de l’environnement de 2004 était adossée à la Constitution et où l’Accord de Paris avait redéfini les ambitions climatiques mondiales, ces juges et procureurs ont intégré ces textes comme des composantes fondamentales du droit positif. Pour eux, la protection de l’environnement ne constitue pas une révolution juridique ou une conquête normative ; elle représente un paysage juridique préexistant, un socle de leur culture professionnelle. Cette imprégnation pourrait ainsi favoriser une application du droit de l’environnement plus directe et décomplexée, considérant ses principes non comme des objectifs programmatiques, mais comme des standards juridiques d’application immédiate au cœur de leur office. La relève de la justice environnementale est assurée.
Conclusion
Dix ans après l’Accord de Paris, l’ordre judiciaire s’est affirmé comme un acteur clé de la mise en œuvre du droit de l’environnement. Sa contribution a consisté à donner un effet utile aux textes par une adaptation pragmatique des outils existants et la consécration de concepts nouveaux. La reconnaissance du préjudice écologique, initiée par la jurisprudence avant d’être consacrée par la loi, en est l’exemple le plus marquant. En faisant évoluer la responsabilité civile d’une logique de simple réparation vers une fonction préventive, le juge judiciaire a contribué à consolider l’édifice de la protection environnementale.
Toutefois, ce rôle, bien que significatif, est encore en construction et demeure incomplet. Des pans entiers de l’action judiciaire ne sont pas encore jugés satisfaisants, que l’on se place du côté du justiciable, de la doctrine, ou des professionnels du droit. Le constat le plus sévère concerne l’effectivité du droit pénal de l’environnement.
Au-delà de la sphère pénale, le plein potentiel d’outils procéduraux novateurs, comme l’action de groupe ou le contentieux du devoir de vigilance, reste encore à déployer pour devenir pleinement effectif. De même, l’articulation délicate entre l’expertise scientifique et la décision de justice demeure un défi constant. C’est donc en poursuivant un dialogue approfondi avec les autres juridictions nationales et européennes, et en s’attelant à ces chantiers, que l’ordre judiciaire pourra pleinement remplir sa mission : assurer, par une application rigoureuse et cohérente du droit, une protection effective de l’environnement et des droits qui la sous-tendent.
La première décennie depuis l’Accord de Paris a été celle de l’adaptation. La prochaine permettra de déterminer si cette évolution subtile est suffisante face à l’ampleur de la crise, ou si elle n’est que le prélude à une révolution judiciaire plus profonde que l’ordre judiciaire a, jusqu’à présent, évitée.
Notes
- Texte écrit avec Mme Clémence Bourillon, magistrate, chargée de mission du premier président et cheffe du service des relations internationales de la Cour de cassation, et avec le concours de M. James Geist-Mokhefi, attaché de justice au service des relations internationales
 - Mireille Delmas-Marty, Les forces imaginantes du droit. Vol. II: Le pluralisme ordonné, Seuil, 2006.
 - Rapport du groupe de travail groupe de travail relatif au droit pénal de l’environnement présidé par M. François Molins, procureur général près la Cour de cassation, 2022.
 - L’article L. 121-2 du code de la consommation, définit l’écoblanchiment comme toutes « allégations, indications ou présentations fausses ou de nature à induire en erreur [notamment le consommateur et les investisseurs sur] les caractéristiques essentielles du bien ou du service, à savoir : ses qualités substantielles, sa composition (…), ses propriétés et les résultats attendus de son utilisation, notamment son impact environnemental [et] la portée des engagements de l’annonceur, notamment en matière environnementale ».
 - Crim., 6 octobre 2009, n° 08-87.75
 - Arrêt fondateur de la chambre civile, en date du 27 novembre 1844
 - Civ. 3e, 4 février 1971, n° 69-12.739
 - Civ. 2e, 19 novembre 1986, n° 85-15.098
 - Civ. 3e, 13 septembre 2018, n° 16-23.694
 - 3ème Civ, 7 décembre 2023, n° 22-22.137
 - Crim., 25 septembre 2012, n° 10-82.938
 - Cons. const., 5 févr. 2021, QPC n° 2020-881
 - L’article 1249 du code civil dispose que « la réparation du préjudice écologique s’effectue par priorité en nature. En cas d’impossibilité de droit ou de fait […] le juge condamne le responsable à verser des dommages et intérêts, affectés à la réparation de l’environnement […]. » L’accent est donc mis sur la restauration concrète de l’environnement altéré, avant tout versement d’une indemnisation pécuniaire.
 - Crim., 5 avril 2011, n° 09-83.277, Stocamine
 - Voir en ce sens : M. G. Faure, « Vers un nouveau modèle de protection de l’environnement par le droit pénal », Revue Européenne de Droit de l’Environnement, 2005, L. Neyret, « Pour la reconnaissance du crime d’écocide », Revue juridique de l’environnement, 2014 ou B. Hurel « Droit pénal de l’environnement : une situation largement perfectible » Délibérée 8.3, 2019, parmi tant d’autres.
 - Crim., 5 octobre 2010, n° 10-80.278
 - Crim., 25 juin 2019, n° 18-83.420
 - M.-A. Moreau, « L’originalité de la loi française du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance dans les chaînes d’approvisionnement mondiales », Droit social, 2017.
 - Affaire Total Energies, T.J. Paris, 28 février 2023
 - Cour d’appel de Paris, Pôle 5 – Chambre 12, 18 juin 2024, RG n° 23/14348
 - Article premier, 1c : … l’obligation pour les entreprises d’adopter et de mettre en œuvre un plan de transition pour l’atténuation du changement climatique qui vise à garantir, en déployant tous les efforts possibles, la compatibilité du modèle économique et de la stratégie économique de l’entreprise avec la transition vers une économie durable et avec la limitation du réchauffement climatique à 1,5 oC conformément à l’accord de Paris.
 - Civ. 1re, 15 nov. 2023, nos 22-21.174, 22-21-178, 22-21.179, 22-21.180 B
 - Ollier, Claire, and Magali Benichou. « Retours sur les mesures adoptées, modifiées et avortées de la Convention Citoyenne pour le Climat. » Crises climatiques, crises sociales, résilience et ruptures. 2023.
 - Radisson L., “Loi climat : de nouveaux délits qui risquent de ne pas dissuader les pollueurs”, ActuEnvironnement, 2021 ; “Loi Climat : la création d’un nouveau délit controversé d’‘ecocide’ votée par les députés », Le Monde, 19 March 2021.
 - Canali, Laura. « La preuve par l’expertise dans le contentieux français des changements climatiques », Revue juridique de l’environnement, 2022.
 - Voir Krakau M., Causation in National and International Climate Change Litigation, Springer, 2025 et Pfrommer T., et al. « Establishing causation in climate litigation: admissibility and reliability », Climatic Change, 2019
 - 
Article 191 du TFUE :
1. La politique de l’Union dans le domaine de l’environnement contribue à la poursuite des objectifs suivants:
– la préservation, la protection et l’amélioration de la qualité de l’environnement,
– la protection de la santé des personnes,
– l’utilisation prudente et rationnelle des ressources naturelles,
– la promotion, sur le plan international, de mesures destinées à faire face aux problèmes régionaux ou planétaires de l’environnement, et en particulier la lutte contre le changement climatique.
2. La politique de l’Union dans le domaine de l’environnement vise un niveau de protection élevé, en tenant compte de la diversité des situations dans les différentes régions de l’Union. Elle est fondée sur les principes de précaution et d’action préventive, sur le principe de la correction, par priorité à la source, des atteintes à l’environnement et sur le principe du pollueur-payeur…
 - Voir en ce sens Civ. 1re, 14 février 2018, n° 17-14.703
 - Civ. 3e, 30 novembre 2022, n° 21-16.404
 - Civ. 3e, 11 janvier 2023, n° 21-19.778
 - 
Article 142-2 du code de l’environnement :
Les associations agréées mentionnées à l’article L. 141-2 peuvent exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits portant un préjudice direct ou indirect aux intérêts collectifs qu’elles ont pour objet de défendre et constituant une infraction aux dispositions législatives relatives à la protection de la nature et de l’environnement, à l’amélioration du cadre de vie, à la protection de l’eau, de l’air, des sols, des sites et paysages, à l’urbanisme, à la pêche maritime ou ayant pour objet la lutte contre les pollutions et les nuisances, la sûreté nucléaire et la radioprotection, les pratiques commerciales et les publicités trompeuses ou de nature à induire en erreur quand ces pratiques et publicités comportent des indications environnementales ainsi qu’aux textes pris pour leur application.Ce droit est également reconnu, sous les mêmes conditions, aux associations régulièrement déclarées depuis au moins cinq ans à la date des faits et qui se proposent, par leurs statuts, la sauvegarde de tout ou partie des intérêts visés à l’article L. 211-1, en ce qui concerne les faits constituant une infraction aux dispositions relatives à l’eau, ou des intérêts visés à l’article L. 511-1, en ce qui concerne les faits constituant une infraction aux dispositions relatives aux installations classées.
 - Crim. 25 septembre 2007, n°05-88.324, Bull. crim n°220, D. 2007. 2671 ; ibid 2008. 109, chron. D. Caron et S. Ménotti; AJ penal, 2008. 83, obs. C. Saas ; RSC 2008 108, obs. A. Giudicelli
 - Crim. 8 septembre 2020, n° 19-85.004
 - Crim. 8 septembre 2020, n° 19-84.995
 - Civ. 3e, 30 novembre 2022, n° 21-16.404
 - Fort, François-Xavier. « L’office du juge administratif sous influence climatique », Revue juridique de l’environnement, 2022, pp 689-701
 - Lormeteau, B. et Torre-Schaub, M., Du nouveau dans le contentieux climatique – Des réponses temporelles et plurielles à l’urgence climatique. Revue juridique de l’environnement, 2021, pp. 257-274
 - Crim. 28 janvier 2020, n°19-80.091
 - Civ 1e., 25 octobre. 2023, n° 21-24.930
 - Civ 2e., 10 décembre 2020, n° 19-22.619
 - Demande d’avis consultatif de la Cour de cassation en date du 16 octobre 2018
 - Le Guide de la rédaction en motivation enrichie (26 septembre 2023) est disponible sur le site public de la Cour de cassation
 - La doctrine internationale analyse la faisabilité de ce projet et plaide en faveur de cela depuis les années 70, avec une accélération depuis l’émergence des contentieux climatiques dans les années 2000.
 - n° 2011-116 QPC du 8 avril 2011
 - Décision du 27 octobre 2023 sur le projet Cigéo
 
citer l'article
Christophe Soulard, Le juge judiciaire et le climat : une décennie de construction silencieuse depuis l’Accord de Paris, Groupe d'études géopolitiques, Nov 2025,