Un visa pour le rêve européen
13/07/2020
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13/07/2020

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Un visa pour le rêve européen

Dans une note pour l’action inédite du Groupe d’études géopolitiques, avec un avant-propos de Philippe Aghion, Antoine Levy et Victor Storchan proposent un plan d’accueil des travailleurs STEM (chercheurs, entrepreneurs innovants, détenteurs de brevets) axé sur deux piliers : l’émission d’un visa de travail de cinq ans, renouvelable, valable sur l’ensemble du territoire de l’UE, et l’engagement, financé en commun par le budget Union, d’exonérer d’impôt sur le revenu ces nouveaux tech migrants pendant les deux premières années de leur contrat. 

Un visa pour le rêve européen

Par un executive order du 22 juin 2020, l’administration Trump a drastiquement réduit l’émission de nouveaux visas pour les travailleurs qualifiés (H1B, L1 et J1) jusqu’à la fin de l’année. À rebours de l’histoire et de l’ethos des États-Unis, le décret plonge un nombre considérable de talents internationaux, scientifiques, chercheurs, ingénieurs et étudiants dans une incertitude inédite. Cette décision, qui s’ajoute à l’imprévisibilité du Brexit, offre à l’Europe une fenêtre d’opportunité inédite pour prendre toute sa place dans la compétition mondiale pour les talents. 

Pour cela, l’Union européenne doit agir à la mesure de ses ambitions technologiques et scientifiques, en déployant rapidement un plan axé sur deux piliers. D’abord, l’émission d’un visa de travail de cinq ans, renouvelable, valable sur l’ensemble du territoire de l’UE, encourageant les travailleurs qualifiés très mobiles à venir créer, construire ou innover sur son territoire. Ce « European tech visa » constituerait un outil puissant d’unification du marché du travail qualifié sur le continent, et un facteur de compétitivité majeur à l’heure où partout ailleurs, les frontières se ferment et la mobilité internationale se tarit. Dans un second temps, les pays de l’UE doivent s’accorder sur l’engagement, financé en commun, d’exonérer d’impôt sur le revenu ces nouveaux migrants pendant les deux premières années de leur contrat, pour rendre leurs rémunérations nettes plus attractives. Combinée avec les systèmes de protection sociale et d’échanges universitaires européens, cette mesure viendrait compléter un paquet de dispositions attrayantes et compétitives face aux puissants financeurs de la recherche que constituent la Suisse, Singapour, et les pays du Golfe. 

Une Europe conquérante et unie dans la bataille des talents peut faire de l’immigration qualifiée un moteur de relance de son innovation, et compenser les flux d’émigration des travailleurs scientifiques formés sur son sol. Les entreprises innovantes à fortes composantes technologiques, de l’intelligence artificielle à la médecine en passant par la robotique, doivent pouvoir s’appuyer sur une ressource renouvelée de talents mondiaux. Les conséquences positives de l’immigration qualifiée pour l’innovation, dont semblent se détourner les États-Unis aujourd’hui, ont été largement documentées dans la littérature économique : les inventeurs immigrés ont déposé le quart des brevets aux États-Unis entre 1976 et 2012, et se sont avérés 40% plus productifs que l’inventeur américain moyen. 

Ce serait donc pour l’UE une faute politique, mais aussi un coût d’opportunité économique considérable que de ne pas se saisir de ce moment inédit. À l’heure de la concrétisation d’un plan de relance d’une dimension historique, les chefs d’États de l’Union actent un désir de reconstruction solidaire, et d’harmonisation économique et fiscale. Un visa et un crédit d’impôt communs pour les talents technologiques et scientifiques viendraient concrétiser cet effort.

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Antoine Levy, Victor Storchan, Un visa pour le rêve européen, Groupe d'études géopolitiques, Juil 2020,

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