Élections régionales en Haute-Autriche, 26 septembre 2021
Harald Stöger
Senior Lecturer à la Johannes-Kepler-Universität LinzIssue
Issue #2Auteurs
Harald Stöger21x29,7cm - 167 pages Numéro 2, Mars 2022 24,00€
Élections en Europe : juin 2021 – novembre 2021
Le contexte des élections régionales
Les deux dernières élections régionales en Haute-Autriche, en 2015 et en 2021, se sont déroulées dans des contextes très différents. Alors que les élections régionales de 2015 avaient eu lieu dans le contexte d’un grand mouvement des réfugiés, celles de 2021 ont été marquées par la pandémie du Covid-19, qui a eu des répercussions sur la campagne électorale. Les campagnes électorales traditionnelles des partis et de leurs candidats n’ont pu être organisées qu’avec des restrictions évidentes et un nombre limité de participants. La pandémie, et plus particulièrement la question de l’attitude à adopter vis-à-vis des personnes non vaccinées, a également entraîné une certaine polarisation de la société de Haute-Autriche, puisque, selon une enquête, 22 % des citoyens n’étaient pas intéressés par la vaccination contre le Covid (ORF 2021). Les jeunes, les personnes moins formellement éduquées et les femmes, en particulier, s’opposent davantage à la vaccination que le reste de la population Au moment des élections régionales, la Haute-Autriche était en queue de peloton des Länder dans ce domaine, avec un taux de vaccination de 59 % de la population totale (apte à être vaccinée).
Les tendances politiques fédérales ont également joué un rôle. Un gouvernement fédéral composé du Parti populaire autrichien (ÖVP) et des Verts, dirigé par le chancelier Sebastian Kurz (ÖVP), est entré en fonction à Vienne début 2020. Après un soutien initial, les mesures prises par le gouvernement fédéral pour lutter contre le Covid-19 se sont heurtées à des critiques de plus en plus virulentes de la part de l’opposition parlementaire formée par le Parti social-démocrate (SPÖ), le Parti autrichien de la liberté (FPÖ) et la Nouvelle Autriche (NEOS). En outre, l’acceptation de ces mesures par la population autrichienne n’a cessé de diminuer au cours de la pandémie (Research Affairs 2021). Environ deux semaines avant les élections régionales, le gouvernement fédéral a décidé de renforcer progressivement les mesures face à l’augmentation des infections au Covid-19 et, dix jours avant les élections, le ministre fédéral de la santé (Verts) a imposé des contrôles temporaires à la sortie du territoire dans le district de Braunau, en Haute-Autriche, justifiés par une incidence locale élevée. L’impact de ces mesures restrictives du gouvernement fédéral sur le comportement électoral en Haute-Autriche était difficile à anticiper : il était possible d’envisager que lors des élections régionales, les électeurs expriment leur mécontentement face aux nouvelles restrictions imposées par le gouvernement fédéral, ou au contraire leur acceptation de ces mesures.
Le système électoral et gouvernemental de Haute-Autriche constitue un autre paramètre important pour les élections régionales (Dachs 2006 : 1012 sqq.), Le principe est celui de la proportionnelle, avec une clause de 4 % qui favorise les grands partis mais rend plus difficile l’entrée au Landtag des petits partis. Il n’y a pas d’élection directe du gouverneur du Land, il est élu par le Landtag à la majorité absolue pour un mandat de six ans. La Haute-Autriche est l’un des derniers Länder à disposer d’un gouvernement proportionnel dans lequel les grands partis sont représentés en fonction de leur part de voix aux élections du Landtag. Au sein de ce gouvernement proportionnel de quatre partis, deux partis forment une coalition et s’accordent sur un programme de travail pour la législature de six ans.
Depuis 1945, la Haute-Autriche est dominée par l’ÖVP, qui occupe sans interruption le poste de gouverneur du Land. Josef Pühringer, gouverneur de longue date, avait cédé son poste à Thomas Stelzer au cours de la récente législature afin de permettre à son successeur de gagner la confiance de la population. En poste depuis avril 2017, le gouverneur Stelzer a en effet pu acquérir un « bonus de confiance » important grâce à son attitude calme et objective. Le taux de satisfaction à l’égard du travail du gouvernement régional (79 %, janvier 2021) et de l’activité du gouverneur Stelzer (80 %, janvier 2021) se situait à un niveau relativement élevé. Selon une enquête Spectra de juillet 2021, 73 % des habitants de Haute-Autriche interrogés avaient une « bonne opinion » du gouverneur (Nachrichten 2021). Ainsi, Stelzer aurait remporté une élection directe fictive du gouverneur du Land avec une avance respectable allant jusqu’à 37 points de pourcentage.
Les autres partis évoluent dans l’ombre de l’ÖVP, qui domine le parlement et le gouvernement du Land. Le SPÖ a dû se contenter pendant des décennies du rôle d’ « éternel second » et n’était plus que la troisième force politique depuis leur score décevant aux élections de 2015. Les Verts sont représentés sans interruption au Landtag depuis 1997 et disposent d’une longue expérience gouvernementale en Haute-Autriche, puisqu’ils ont formé une coalition avec l’ÖVP entre 2003 et 2015. Le FPÖ a obtenu son meilleur résultat historique lors des élections régionales de 2015 dans le sillage de la vague de réfugiés, a remplacé le SPÖ en tant que deuxième parti le plus important et a été le partenaire junior de l’ÖVP dans un gouvernement commun au cours des six dernières années. Durant cette phase, les dirigeants du FPÖ régional se sont montrés le plus souvent soucieux de l’État et ont renoncé à leur rhétorique de droite populiste. Il existait toutefois un risque que le FPÖ de Haute-Autriche se retrouve, lors des élections régionales, dans la tendance à la baisse qui avait touché le parti fédéral et certaines sections régionales du FPÖ depuis 2019 (notamment lors des élections régionales et municipales de Vienne en 2020). Outre la « vidéo d’Ibiza », l’affaire autour des frais de l’ancien président du FPÖ, H.C. Strache, avait également contribué à une perte de popularité auprès des électeurs.
La campagne électorale
Onze partis au total se sont présentés aux élections régionales de 2021, dont six petits partis (Liegl 2006 : 402 sqq.), qui ne se sont toutefois pas tous présentés dans les quatre circonscriptions du Land.
La campagne électorale de l’ÖVP a été fortement personnalisée et a misé en premier lieu sur le gouverneur sortant du Land, également tête de liste, et en second lieu sur les thèmes de la migration/asile, de l’intégration et de la protection de l’économie (Wiener Zeitung 2021). Le SPÖ, avec sa tête de liste Birgit Gerstorfer, s’est concentré sur des thèmes sociopolitiques clés tels que les soins de longue durée, la sécurité des retraites, le maintien de l’emploi ou l’éducation, et s’est efforcé de se démarquer des autres partis sur le fond (ORF 2021b). Le FPÖ, avec son candidat principal Manfred Haimbuchner, s’est présenté comme le parti de « l’ordre » et de la « sécurité » et a défendu des positions restrictives en matière d’asile et d’intégration. Pour des raisons tactiques, il s’est cependant abstenu d’attaquer son partenaire de coalition au niveau régional, l’ÖFP. Le FPÖ a dressé un bilan positif de sa propre activité au sein du gouvernement régional, notamment en matière de politique du logement (ORF 2021c). Les Verts, qui se présentaient pour la première fois avec Stefan Kaineder comme tête de liste, se sont profilés — sans surprise — sur les questions environnementales et climatiques et ont exigé une politique climatique plus engagée afin de permettre au Land d’atteindre la « neutralité climatique » d’ici 2040. Le parti NEOS, avec Felix Eypeltauer comme tête de liste, a quant à lui misé sur la transparence politique, le contrôle et l’abolition du système proportionnel afin d’obtenir une séparation explicite entre majorité gouvernementale et opposition (ORF 2021d). Outre le FPÖ, un nouveau parti participait à ces élections, le MFG (« Menschen-Freiheit-Grundrechte » Humains-Liberté-Droits Fondamentaux), qui se positionnait de manière plus radicale contre les mesures sanitaires du gouvernement. Le MFG, dont Joachim Aigner était la tête de liste, s’est fermement opposé à l’obligation de vaccination contre le Covid-19 et aux restrictions (y compris à un confinement) pour les personnes non vaccinées, les considérant comme une atteinte aux droits fondamentaux et aux libertés. Les autres petits partis n’ont pas réussi à s’imposer dans la campagne électorale, en raison du manque de ressources et de l’absence de présence médiatique sur la chaîne publique ORF (Wiener Zeitung 2021).
L’obligation vaccinale générale et le renforcement des contraintes pour les personnes non vaccinées ont été rejetées par les partis pour des raisons de tactique électorale. Le risque de perdre des voix au profit du MFG, dont la campagne électorale marquante et très médiatisée s’est explicitement focalisée sur les personnes opposées ou sceptiques vis-à-vis du vaccin, semblait trop important (Kleine Zeitung 2021). Seul le parti NEOS, interrogé à ce sujet, a plaidé en faveur d’une vaccination obligatoire du personnel soignant et enseignant, mais s’est opposé à ce que les personnes non vaccinées paient une quote-part de l’assurance maladie obligatoire (ORF 2021e).
Pour les électeurs, la pandémie a été le thème dominant de la campagne électorale. Selon le sondage réalisé le jour des élections par ORF/ISA/SORA, 46 % des personnes interrogées ont déclaré qu’elles avaient le plus souvent discuté du « Covid » pendant la campagne électorale. D’autres thèmes, tels que « le coût de la vie quotidienne » (30 %), « la prévention en matière de santé et les soins » (29 %) ou « les emplois et les conditions de travail » (29 %), suivaient à une distance respectable. La « protection de l’environnement et du climat » (22 %) n’a joué qu’un rôle périphérique dans les débats au sein de la population. Le thème du Covid a également été le principal sujet de discussion pour les électeurs des différents partis, si l’on excepte les Verts, dont les électeurs ont le plus souvent discuté de la protection de l’environnement et du climat. La pandémie a également relégué au second plan la question de savoir qui serait le gouverneur idéal pour la Haute-Autriche (« Landeshauptmannfrage » ou « question du gouverneur »), souvent abordée lors des élections régionales précédentes (ORF 2021f).
Le résultat et son interprétation
76,3 % des quelque 1,1 million d’électeurs ont participé aux élections régionales du 26 septembre 2021. Le taux de participation était donc inférieur d’environ 5 points à celui de 2015, ce qui doit être interprété comme un effet de la pandémie de Covid-19.
Les élections régionales ont entraîné les transferts de voix et de pouvoir suivants entre les différents partis (voir encart « les données »).
Comme on pouvait s’y attendre, l’ÖVP a clairement remporté les élections au Landtag, obtenant 37,6 % des voix (et 22 sièges au Landtag). Le gain par rapport au plus mauvais résultat électoral historique de 2015 n’était toutefois que de 1,2 points et était inférieur aux prévisions des sondages préélectoraux sérieux.
Le FPÖ a chuté à 19,7 % (11 sièges), perdant ainsi environ un tiers de ses voix de 2015, mais conservant sa deuxième place juste devant le SPÖ. Le SPÖ a amélioré de manière marginale son résultat de 2015 et a obtenu 11 sièges, mais n’a pas atteint son propre objectif électoral d’au moins 20 %. Avec 12,3 % (7 sièges), les Verts ont obtenu le meilleur résultat de leur histoire en Haute-Autriche, mais les gains sont restés faibles.
Le parti NEOS a obtenu 4,2 % (2 sièges) et a ainsi franchi pour la deuxième fois depuis 2015 la barrière des 4 % nécessaires pour entrer au Landtag. Mais la véritable surprise de ces élections régionales est venue du MFG qui, pour sa première candidature, a obtenu 6,2 % des voix (3 sièges). Les autres partis n’ont pas obtenu suffisamment de voix pour être représentés au Landtag.
La baisse de la participation a surtout porté préjudice au FPÖ, puisque près de 36 000 de ses électeurs de 2015 ont renoncé à voter et que le parti a en outre perdu près de 47 000 électeurs au profit de l’ÖVP. De même, le FPÖ a perdu près de 14 000 électeurs au profit du MFG, qui a également mobilisé un nombre significatif d’anciens électeurs de l’ÖVP. Les Verts ont pu améliorer leur résultat de 2015, notamment grâce au gain d’anciens électeurs de l’ÖVP et du NEOS. Quant au NEOS, il a surtout séduit des électeurs qui avaient encore opté pour l’ÖVP et le SPÖ en 2015. Le SPÖ a perdu du terrain du fait de l’abstention de certains de ses anciens électeurs, et n’a attiré qu’assez peu d’électeurs issus des autres partis (Verts, ÖVP, NEOS) (OÖ 2021).
L’analyse des motivations des électeurs souligne une fois de plus l’importance de la politique sanitaire dans la décision de voter pour ou contre un parti donné. Pour les électeurs du FPÖ et du MFG, le rejet de la politique actuelle du Covid-19 et de l’obligation de vaccination, mais aussi le souci des droits fondamentaux et des libertés a joué un rôle prépondérant dans leur décision de vote. Pour les électeurs du SPÖ, ce sont les questions de politique sociale qui ont été déterminantes, tandis que les partisans des Verts ont cité la question du climat et de l’environnement comme principal motif de vote (Profil 2021). Le Covid a en outre clairement fait passer au second plan l’importance des têtes de liste. La tête de liste n’a été le principal motif de vote que pour les électeurs de l’ÖVP, ce qui témoigne de l’importante « prime au sortant » qui a bénéficié au gouverneur Stelzer, et a peut-être empêché l’ÖVP de perdre des voix. Pour les électeurs du SPÖ, du FPÖ, du NEOS et des Verts, en revanche, la tête de liste était beaucoup moins importante. Pour ces partis, ce sont les aspects de fond, c’est-à-dire les programmes des partis et les programmes électoraux, qui ont occupé la première place. Il est remarquable que l’ÖVP ait remporté l’élection alors qu’il a fait campagne sur des thèmes qui ne correspondaient que dans une faible mesure aux thèmes centraux de la campagne électorale au sein de la population. Cela plaide en faveur de la thèse de la personnalisation, selon laquelle la personnalité du candidat principal était au centre des préoccupations des électeurs de l’ÖVP.
Pour terminer, on discutera brièvement des principales caractéristiques sociales des électeurs des différents partis, en suivant une approche microsociologique (Kritzinger 2014 : 192-196). Le vainqueur des élections, l’ÖVP, a été le parti le plus fort chez les femmes, les indépendants et les retraités (plus de 65 ans), tandis que les Verts ont eu davantage de succès auprès des jeunes électeurs (moins de 29 ans) et, de manière surprenante, auprès des employés du secteur public, un groupe professionnel traditionnellement proche de l’ÖVP en Haute-Autriche. Le FPÖ s’est imposé dans le groupe des ouvriers, tandis que le SPÖ n’y a obtenu que 21 % des voix. Les Verts et NEOS sont significativement sous-représentés dans ce groupe d’électeurs (ORF 2021f).
c • Score des Verts au niveau municipal (ordonnée) en fonction de la densité de population (abscisse) d • Score des Verts au niveau municipal
Tendances géographiques du comportement électoral
Si l’on analyse les résultats électoraux des partis en fonction de critères géographiques, on constate quelques schémas caractéristiques (Eberl et al. 2020 : 1358) : lors de ces élections régionales, l’ÖVP victorieux a également obtenu de meilleurs résultats dans les communes rurales que dans les zones urbaines (figure a). L’ÖVP a obtenu ses meilleurs résultats dans les régions rurales du nord et du sud-ouest de la Haute-Autriche et a été moins bien accueilli dans la capitale du Land, Linz, ainsi que dans le sud (figure b). Quant au FPÖ, ses bastions électoraux se situent dans les communes rurales de l’ouest, près de la frontière bavaroise. Une analyse en composantes principales montre que 26 % des écarts par rapport au résultat moyen des élections régionales sont dus aux meilleurs résultats du FPÖ dans l’ouest et aux performances comparativement plus faibles des autres partis dans cette partie du Land (figure e, à droite). Contrairement à l’ÖVP et au FPÖ, les Verts (ainsi que le NEOS) ont enregistré une progression électorale plus importante dans les zones urbaines que dans les zones rurales (figure c). Un regard plus attentif sur les résultats des communes montre que les Verts n’ont pas seulement obtenu leurs meilleurs résultats dans les espaces urbains (en particulier à Linz et dans ses environs), mais aussi dans certaines communes rurales du nord et du sud (figure d). Comme lors des élections régionales de 2015, les voix pour le SPÖ étaient surtout concentrées à Linz et ses environs ainsi que sur certaines communes du sud. Les bons résultats du SPÖ (et des Verts) dans ces régions correspondent à des résultats comparativement plus faibles pour les autres partis (figure e, à gauche). Le SPÖ dispose dans le sud et dans la région centrale, plus industrielle, d’électeurs habituels issus des milieux ouvriers traditionnels et syndiqués, mais il n’a pas été en mesure — comme en 2015 — de mobiliser davantage en dehors de ces bastions anciens. Le MFG a attiré des électeurs dans différentes parties du Land ; il a été le plus fort dans les communes où le taux de vaccination contre le Covid-19 est faible, c’est-à-dire inférieur à la moyenne nationale de Haute-Autriche (ORF 2021g).
La question de la formation du gouvernement
Pendant la campagne électorale, l’ÖVP a évité de faire des déclarations concrètes sur son future choix de coalition, laissant toutes les options sur la table. Un éventuel gouvernement avec le FPÖ n’était envisageable à la condition que le FPÖ régional se distancie systématiquement de la ligne populiste de droite de son parti fédéral (Die Presse 2021). Pendant la campagne électorale, le FPÖ a ouvertement fait campagne pour la poursuite de la coalition avec l’ÖVP, et les Verts ont également fait part de leur intérêt pour un gouvernement avec l’ÖVP. Le SPÖ, en revanche, ne s’est pas prononcé sur une éventuelle participation au gouvernement. Les électeurs de Haute-Autriche n’ont pas montré de préférence claire pour une coalition gouvernementale particulière, et les électeurs de l’ÖVP étaient également divisés sur la question de la coalition.
En raison des résultats des élections, quatre partis (ÖVP, FPÖ, SPÖ, Verts) seront représentés dans le prochain gouvernement régional, tandis que NEOS et MFG n’ont pas réussi à obtenir de siège au gouvernement malgré leur entrée au parlement régional. Conformément aux usages politiques, les partis ont entamé des discussions sur un futur gouvernement de coalition dès que les résultats officiels des élections régionales ont été publiés.
L’ÖVP de Haute-Autriche, en tant qu’« acteur décisif » (Müller 2006 : 362) dans le système des partis, disposait de plusieurs options pour former une coalition. Au vu des résultats des élections régionales, il était possible que l’ÖVP forme un gouvernement de coalition avec le FPÖ, le SPÖ ou les Verts, qui disposent chacun d’une majorité différente au parlement régional. Deux combinaisons semblaient d’emblée improbables. Les Verts et l’ÖVP défendent des positions idéologiques si différentes sur des sujets importants tels que la protection du climat, la politique des transports, l’asile et la sécurité, qu’une coopération gouvernementale à long terme serait conflictuelle. Une coalition ÖVP-SPÖ a certes été approuvée sur le principe par la chambre économique et la chambre du travail régionales, mais le SPÖ ne se voyait pas dans le rôle de partenaire junior (« pourvoyeur de majorité ») d’un ÖVP fort.
Après de brefs entretiens exploratoires non contraignants avec tous les partis représentés au Landtag, la direction de l’ÖVP a décidé à l’unanimité, peu après les élections au Landtag, d’entamer des négociations de coalition avec le FPÖ, qui ont été finalisées au bout de 26 jours, permettant ainsi de présenter la répartition des portefeuilles et le programme de gouvernement (ORF 2021h). Le gouvernement ÖVP-FPÖ représente la prolongation d’un partenariat qui fonctionne et dispose, avec 33 mandats sur 56, d’une large majorité au Landtag. Sur des questions importantes telles que l’asile, l’intégration, la politique économique et la politique d’implantation, la distance idéologique entre les deux partis est faible, de sorte que les compromis entre les partenaires de la coalition sont plus facilement réalisables. Un autre argument en faveur de la coalition ÖVP-FPÖ est le fait que la campagne électorale pour les élections régionales a été menée de manière relativement équitable entre ces deux partis sur une grande partie du territoire. Dans le futur gouvernement commun, l’écart de pouvoir entre l’ÖVP, vainqueur des élections, et le FPÖ, perdant, est en outre plus marqué, ce qui, du point de vue de l’ÖVP, plaidait pour une réédition de cette variante de coalition. Du point de vue de la théorie des coalitions (Buzogány & Kropp 2013 : 261-266), le gouvernement ÖVP-FPÖ est une coalition à « majoritaire minimale », caractérisée par une asymétrie de pouvoir prononcée et une faible distance idéologique entre les partis impliqués.
Les effets des élections régionales
Le résultat des élections régionales n’a aucune conséquence sur les prochaines élections du Nationalrat (chambre basse du parlement autrichien, n.d.T.), puisque la législature ne se terminera normalement qu’en 2024. L’effet sur les rapports de force au sein du Bundesrat, deuxième chambre du Parlement autrichien déléguée par les Länder, est plus important. La composition du Bundesrat dépend en effet des résultats des élections régionales. Les pertes du FPÖ en Haute-Autriche signifient qu’un mandat au Bundesrat passe du FPÖ à l’ÖVP. L’opposition, composée au niveau fédéral du FPÖ, du SPÖ et du NEOS, perd ainsi sa majorité de 31 députés au Bundesrat. Elle ne peut donc plus opposer de veto suspensif aux décisions législatives prises par les partis gouvernementaux ÖVP et Verts au Nationalrat. Ce veto retarde le processus législatif de huit semaines au maximum et a contribué par le passé à une meilleure intégration des partis d’opposition dans le travail parlementaire. Ainsi, le résultat des élections en Haute-Autriche implique également une perte de pouvoir sensible pour l’opposition au niveau fédéral.
Malgré leur caractère régional, ces élections sont également un test d’humeur pour le gouvernement fédéral en place et une mesure de l’« athmosphère générale » dans le pays (Schakel & Romanova 2018, Schakel & Jeffery 2013). Les résultats des élections en Haute-Autriche n’ont certainement pas donné un coup de pouce politique au gouvernement fédéral de l’ÖVP et des Verts. Les gains élevés et inattendus du MFG reflètent le mécontentement d’une partie de l’électorat à l’égard des mesures de lutte contre le Covid-19 aux niveaux fédéral et régional. Dans une certaine mesure, les élections régionales de Haute-Autriche peuvent ainsi être interprétées comme un vote de protestation — modéré — envers les gouvernements fédéral et régional. Dans ce contexte, il n’est pas exclu que l’issue des élections au Landtag ait des répercussions sur les futures mesures sanitaires et influence la manière d’aborder le sujet sensible de la vaccination contre le Covid-19. Le score du MFG reflète en outre la perte de confiance croissante, depuis des années, dans la politique et sa capacité à résoudre des problèmes complexes (OGM 2021). Il serait intéressant d’observer si le MFG reste un phénomène propre à la Haute-Autriche ou s’il se présente également avec succès aux élections municipales et régionales dans d’autres Länder. La question des perspectives politiques à long terme du MFG après la fin de la pandémie de Covid-19 reste intéressante.
Références
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citer l'article
Harald Stöger, Élections régionales en Haute-Autriche, 26 septembre 2021, Groupe d'études géopolitiques, Mar 2022, 133-139.